La difficulté de gérer la création graphique d’un site e-commerce : le prestataire (2) (10 novembre 2010)

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Dans l'artice précédent sur la difficulté de gérer la création graphique par le client, nous avons vu quelques "symptômes" typiques qui peuvent rendre cette phase de production d'un site assez pénible pour le prestataire.

Mais vous le savez, losqu'une situation devient difficile, ce n'est jamais que de la faute de l'un, ou que de la faute ou de l'autre. Chacun à ses responsabilités. Et parfois, le client a aussi de bonnes raisons de s’arracher les cheveux. Je vois plusieurs raisons principales.

  • Manque de méthodologie de l'agence dans la gestion du webdesign.
  • La sous-traitance
  • L'erreur de casting
  • L'intégrateur

Voyons cela en détail.

Méthodologie de création d’une interface web

Pour réaliser une interface de site web qui tient la route, il faut idéalement faire intervenir plusieurs compétences qui correspondent à plusieurs étapes de la production :

Le client doit être impliqué à chaque étape, et il valide successivement le wireframe, les maquettes graphiques, puis le site définitif.

Là ou ça commence à coincer, c’est que bien souvent, cette méthodologie qui est censée garantir un résultat optimum lorsqu’elle est bien exécutée, n’est pas respectée. Soit le prestataire zappe l'étape du wireframing, soit le brief créatif est baclé, soit les 2.

 

Wireframe ? C’est quoi ce truc ?

Un wireframe, ca peut ressembler à ça:

wireframe.jpg

et cette étape est primordiale pour démarrer la conception de son site sur des bonnes bases (voir l'article Comment bien concevoir l'interface de son site ? La solution grâce aux wireframes).

Pourtant, certains prestataires ne font pas de wireframe, ou alors, du très light, qui ne sert pas à grand chose (aussi appelé zoning).

Principale raison ? Plus on multiplie les étapes (et donc le temps passé sur un projet), plus cela augmente le coût du projet. Logique.. mais quand on travail pour des TPE/PME qui ont des petits budgets pour faire leur boutique en ligne, cela va dans le sens inverse de la rentabilité. Ou alors, le coût de création du site n'est plus accessible pour les petites entreprises. Pas trop le choix pour le prestataire que d'essayer d'aller directement à l'objectif initial en zappant quelques étapes...

Le webdesigner attaque donc la création « dans le dur », sur la base du brief créatif uniquement. Cette technique d’assault peut bien fonctionner sur un site simple sans trop de contenu, ou avec un webdesigner très compétent qui maitrise le design d’interface.
Mais sur un site e-commerce, la notion d'usabilité (et donc le taux de conversion qui indirectement en découle) est tellement importante, qu'il me semble très risqué d'ignorer cette méthode.

Résultat ? Le prestataire propose une interface très jolie, mais peu efficace du point de vue de l'expérience client, qui va nécessiter de nombreuses optimisations (et donc une perte de temps parfois conséquente) pour transformer une oeuvre d'art en outil de vente.

Par chance, la majorité des clients ne savent pas ce qu’est un wireframe, ni à quoi ça sert...

 

Equipe réduite

La plupart des agences web de France sont composées de moins de 5 personnes (1 chef de projet + 1 webdesigner + 1 développeur intégrateur au minimum), et n’ont pas les moyens d’avoir en interne un collaborateur avec un profil de concepteur ergonome.

Le wireframe est donc souvent conçu par le chef de projet qui maitrise peu le sujet (plus rarement par le webdesigner).

Résultat ? Le wireframe est soit incomplet, soit mal pensé, et c’est le webdesigner qui doit se débrouiller pour rattraper le tir avec le client. Ou pas…

 

Sous-traitance

Autre cas de figure, bizarrement plutôt du côté des "grosses" agences : le webdesigner travaille en amont sur les maquettes principales qui définissent les grands principes graphiques, puis il refile le bébé à son assistant (stagiaire) ou à un freelance pour réaliser les déclinaisons (car le Directeur Artistique comme on l'appelle dans la Com', n'aime pas faire de la déclinaison, travail indigne de son statut de Créatif...).

Le problème c'est que même une "simple déclinaison" nécessite d'avoir des compétences en conception d'interface, et une bonne culture du webdesign. C'est comme changer de peintre en cours de route lors de la réalisation d'un tableau. Les chances d'avoir un résultat final cohérent sont très ...disons...  aléatoires !

La phase de validation des maquettes peut alors prendre plus de temps que tout le reste du projet à force d'aller-retour pour caler les nombreux détails qui pemettent de garder une cohérence sur toutes les maquettes.

Là encore un client qui n'y connait pas grand chose saura se contenter de ce qu'on lui met sous les yeux, donc tout va bien...

 

Erreur de casting 

 J’ai déjà largement parlé dans un artice précédent de la question des différences fondamentales entre la création d’un site web et d’un support print, mais aussi la différence entre la création d’un site institutionnel, d’un site éditorial, d’un site évènementiel, d’un réseau social, ou d’un site e-commerce.

Dans ces 5 cas de figure, la manière de concevoir l’interface pour une utilisation optimum par les visiteurs répond à des normes et des contraintes différentes.

Une erreur de casting sur le choix de l’agence ou sur l’expertise et la séniorité du webdesigner dans son domaine, et ça sera une sacrée galère en perspective pour obtenir une création de site e-commerce qui tient la route.

(Et bien sûr, un client qui n'y connait pas grand chose saura se contenter de ce qu'on lui met sous les yeux).

 

Le brief créatif

Le brief créatif est une étape incontournable avant de commencer la création.

Et pourtant… j’en vois encore qui se contentent juste de demander au client son logo et les supports de communication déjà existants. Et c’est tout !

Comment bien travailler sur la création d’une charte graphique web, si l’on ne connaît pas l’identité de l’entreprise, son secteur d’activité, ses produits, ses clients, ses objectifs, etc… ?

Exigez donc de faire un vrai brief créatif avec votre prestataire, par écrit pour vous permettre de bien réfléchir à ce que vous voulez, puis de vive voix avec le webdesigner pour être sûr que rien n’est oublié. 

Voici un exemple de brief créatif généraliste pour un site web.

(Et bien sûr, un client qui n'y connait pas grand chose saura se contenter de ce qu'on lui met sous les yeux).

 

L'intégrateur n'aime pas le calage au pixel près

L'intégrateur récupère les maquettes graphiques pour les transformer en page HTML et intégrer le front office du site.

Je ne sais pas pourquoi mais cette étape est quasiment toujours une vraie galère. En 11 ans de web, je n'ai quasiment jamais vu un intégrateur capable de reproduire fidèlement une maquette Photoshop en HTML.
Je vois d'ici les agences web qui lisent ce blog me sauter dessus pour me dire que je n'ai pas travaillé avec les bonnes personnes...

  1. Souvent, je ne les ai pas choisie.
  2. En 11 ans, et plus de 150 productions de sites à mon actif, j'en ai vu passer des prestataires web, et je pense que je me permettre de faire des généralités.

A la décharge des intégrateurs, la créativité du webdesigner qui invente des choses pas forcément transposable en HTML, ou pas si pratiques que ça en avait l'air sur le papier quand ca fonctionne pour de vrai. Donc il faut adapter les maquettes.

Mais globalement, il est rare de trouver des intégrateurs qui connaissent le sens du mot "rigueur", qui se traduit dans leur langage par "calé au pixel près", ou "aligné sur la grille".

Résultat : après avoir passé des heures à peaufiner des maquettes graphiques avec le webdesigner, vous recommencez avec l'intégrateur pour essayer d'obtenir le résultat le plus fidèle possibles aux maquettes.

 

Conclusion

Il n’y a malheureusement pas de recette miracle pour bien gérer la création de son site web.

Du côté client,  la 1ère chose à faire est de mettre à niveau ses références en matière de webdesign pour savoir un minimum ou l’on met les pieds, et connaitres les tendances du moment. Personnellement, je conseille toujours à mes clients de regarder des galeries de webdesign.

2ème conseil : travailler si possible avec des experts sur toute la chaine de conception / création, plutôt que de se jetter sur le prestaire le moins cher qui a forcément des ressources limitées, ou une méthodologie de travail « artisanale ". Sur le moyen terme, ce n’est jamais un bon calcul.  Vous prenez le risque d’avoir un site peu efficace (mauvais taux de conversion = perte de CA quotidienne !!!) , et de devoir le refaire rapidement. Voici un témoignage édifiant de Delphine du site Torpille.fr qui illustre bien le propos.

3ème conseil : travailler en amont sur un brief créatif avec l’agence ou le webdesigner pour définir les codes graphiques, partager sa vision du futur site, plutôt que d’attendre sagement que le prestataire sorte de son chapeau LA création qui tue.

Avec la conception du wireframe, cela permet de cadrer la phase créative, et de limiter les risques de dérapage.

4ème conseil: Piloter un prestataire web, c’est un travail à part entière. Si vous ne l’avez jamais fait, c’est peut-être une bonne idée de se faire accompagner par une personne indépendante qui maitrise la conception web et la gestion de projet. Elle  pourra vous orienter, et piloter les débriefs créatifs avec l’agence et vous.

Côté agence, à part dire que le wireframing est une formidable technique pour cadrer en amont la phase de création avec le client, et que cet exercice doit être fait si possible par des personnes expertes... rien à ajouter.

 

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